Allocation touristique Algérie : pourquoi les 750 € tardent à arriver
Annoncée en décembre 2024 pour renforcer le pouvoir d’achat des voyageurs algériens, l’allocation touristique passée de 100 € à 750 € reste, six mois plus tard, hors de portée. Entre guichets prêts et flottement réglementaire, où en est réellement le dossier ?
Pour les Algériens qui préparent un voyage à l’étranger, la promesse d’une allocation touristique revalorisée à 750 euros avait tout d’un soulagement attendu. Mais six mois après l’annonce présidentielle, c’est le silence qui domine. Dans les halls des banques, les guichets de change sont bien là, flambant neufs, mais sans billets à distribuer.
À l’aéroport, certains voyageurs repartent déçus. Sur les réseaux sociaux, les mêmes questions reviennent, “Quand ?”, “Pourquoi ce retard ?”, “Est-ce encore une fausse annonce ?” L’incompréhension grandit, tout comme l’écart entre les discours politiques et la réalité des citoyens.
Allocation touristique en Algérie, un cadeau présidentiel bloqué
Annoncée officiellement lors du Conseil des ministres du 8 décembre 2024, la revalorisation de l’allocation touristique devait entrer en vigueur au 1er janvier 2025. Cette mesure aurait permis à chaque adulte algérien de bénéficier de 750 € par an (et 300 € pour les mineurs) au taux officiel de la Banque d’Algérie, contre 15 000 dinars jusque-là, soit à peine 100 €.
L’objectif, alléger les dépenses à l’étranger et réduire le recours au marché parallèle des devises Avec 750 €, un voyageur peut couvrir près de 4 à 5 jours de dépenses moyennes dans une capitale européenne.
Ministère des Finances, « c’est la Banque d’Algérie qui doit agir »
Interpellé le 19 juin à l’Assemblée, le ministre des Finances Abdelkrim Bouzred a confirmé la finalisation de la logistique via les douanes et guichets de change. Mais il a clairement déplacé la responsabilité, la décision d’entrer en vigueur relève exclusivement de la Banque centrale, garante du contrôle des changes
En mars, il avait évoqué un déblocage deux semaines après l’Aïd el-Fitr. Mais même mi-avril, malgré une promesse d’entrée en opération, le coup d’envoi n’a toujours pas été lancé
Pourquoi ce retard est plus qu’un simple contretemps
Ce n’est pas juste une formalité repoussée. Ce retard frappe directement le portefeuille de milliers d’Algériens qui voyagent, étudient ou soignent leurs proches à l’étranger. Chaque jour d’attente sans l’allocation promise, c’est un passage obligé par le marché parallèle, des devises payées au prix fort, et un sentiment grandissant de déconnexion entre les annonces et la réalité.
1- Impact sur le marché parallèle
Sans l’allocation officielle, les voyageurs continuent à puiser sur le marché noir, alimentant la dépréciation du dinar, des taux oscillant entre 250–260 DZD pour 1 €, bien au-dessus du taux officiel de 140 DZD/€
2 – Injustice ressenti par les citoyens
Comparés à leurs voisins (Maroc, Tunisie), qui bénéficient d’allocations bien plus élevées, les Algériens se sentent lésés. Une allocation de 750 € ,symbolique certes aurait aidé à rétablir un minimum d’équité
3 – Modernisation bancaire en péril
La mesure s’inscrit dans un plan plus vaste de réforme du secteur bancaire. Mais sans action concrète, la digitalisation et la transparence restent abstraites
Six mois de lancements, zéro versement
- 8 décembre 2024 : le président Tebboune annonce en Conseil des ministres l’augmentation de l’allocation touristique, passant de 15 000 DZD (~100 €) à 750 € pour les adultes, et 300 € pour les mineurs.
- 1er janvier 2025 : date prévue de mise en vigueur selon le communiqué officiel, jamais appliquée.
- Avril 2025 : installation des guichets de change aux aéroports, ports et frontières terrestres, prêts à fonctionner.
- 19 juin 2025 : le ministre des Finances, Abdelkrim Bouzred, clarifie que l’activation dépend de la Banque d’Algérie, et aucune échéance n’est fixée
- En 2023, près de 15,3 millions de voyageurs ont transité par les aéroports algériens au 1er semestre, dont 6,7 millions sur les liaisons internationales
- Toujours en 2023, 3,3 millions de touristes étrangers sont venus en Algérie, dont 1,1 million de membres de la diaspora
- Si chaque voyageur algérien emmenait 750 € en devises, cela représenterait plus de 2 milliards d’euros injectés dans le circuit officiel, plutôt que sur le marché parallèle.
- Or aujourd’hui, le taux parallèle du dinar flirte avec les 250–260 DZD/€, presque le double du taux officiel (~140 DZD/€), en partie alimenté par cette attente d’allocation
Mais six mois plus tard, cette somme reste inaccessible. Aucun décret d’application n’a été publié. Les banques ont reçu les instructions logistiques, les guichets de change sont fonctionnels depuis avril 2025, mais la Banque d’Algérie n’a toujours pas activé la distribution officielle.
Ce qui reste à faire avant de recevoir l’Allocation touristique de 750 €
| Étape | Description |
|---|---|
| Publication de l’instruction officielle par la Banque d’Algérie | Démarre le dispositif |
| Formation des guichetiers | Toutes les banques publiques sont prêtes |
| Mise à disposition du droit de change dans les guichets | Ports, aéroports, frontières terrestres |
| Communication institutionnelle transparente | Calendrier clair attendu |
Véritable bouffée d’air pour les voyageurs algériens, l’allocation touristique de 750 € reste aujourd’hui un vœu pieux, coincé par une histoire administrative. La balle est clairement dans le camp de la Banque d’Algérie, seule capable de passer du geste politique à l’acte concret.
Pour les familles voyageant cet été, ce montant représente une bouffée d’oxygène dans un contexte économique tendu. Espérons que la décision ne reste pas lettre morte et que la mise en œuvre soit bientôt à la hauteur de l’annonce.
