Economie

Algérie : le PLF 2026 resserre l’étau sur les devises et les voyageurs

Le projet de loi de finances 2026 consacre un nouveau virage économique. L’État cible les devises, les importations et les transferts d’argent à l’étranger, dans une volonté affichée d’assainir le marché et de protéger le dinar.

Derrière ses chiffres et tableaux comptables, le PLF 2026 dévoile une ambition politique claire, réduire la circulation de l’argent informel et assainir les flux financiers. Dans un pays où près de la moitié de l’économie échappe encore à l’impôt, le gouvernement choisit de frapper au portefeuille.

Les projections budgétaires sont prudentes, 8 009 milliards de dinars de recettes attendues pour 2026, dans un contexte marqué par la baisse des revenus pétroliers. Cette contraction pousse l’État à diversifier ses sources de financement et à sécuriser les flux entrants et sortants du territoire.

Une stratégie budgétaire axée sur le contrôle et la transparence

Adopté en Conseil des ministres le 5 octobre 2025, le projet de loi de finances 2026 (PLF 2026) confirme la volonté du gouvernement de serrer la vis sur les flux financiers. Pas de nouveaux impôts, mais un arsenal de mesures contre l’évasion fiscale et le blanchiment d’argent.

Dans un contexte où l’économie informelle pèserait plus de 50 milliards de dollars, les autorités veulent récupérer une partie de ces capitaux qui échappent encore au circuit bancaire. Le texte prévoit un budget global de 16 861 milliards de dinars, avec des recettes fiscales en hausse et des subventions maintenues à 5 753 milliards DA, dont 420 milliards pour l’allocation chômage.

Devises : un plafond unique à 1 000 euros pour tous les voyageurs

C’est l’une des mesures phares du texte, le seuil de déclaration obligatoire est fixé à 1 000 euros, qu’il s’agisse de résidents ou de non-résidents. Les douanes pourront saisir temporairement les devises si leur origine n’est pas clairement justifiée.

Sont concernés : les billets de banque, les pièces de monnaie, les chèques, les valeurs au porteur et même les métaux précieux. Le ministère des Finances veut ainsi uniformiser les règles et renforcer la traçabilité des flux à travers les frontières.

Blanchiment d’argent : des sanctions alourdies et un contrôle accru

Le PLF 2026 double les pénalités fiscales pour les contrevenants, passant de 1 % à 2 % de pénalité mensuelle. Une part de ces recettes – jusqu’à 30 % – sera réaffectée à l’amélioration du contrôle fiscal.

Les activités de négoce de métaux précieux (or, argent, platine) sont désormais soumis à un agrément fiscal obligatoire, sous peine de suspension immédiate. De plus, il est interdit d’envoyer des devises ou des métaux précieux par voie postale.

Ces mesures visent à couper les circuits informels souvent utilisés pour le blanchiment d’argent et la fuite de capitaux.

Douanes : fin de la tolérance sur les transferts suspects

Les services des douanes algériennes auront désormais un pouvoir élargi : ils pourront exiger des justificatifs d’origine et de destination des fonds et saisir les sommes suspectes en cas de non-conformité.
Une taxe de passage révisée est également prévue :

  • 5 000 DA pour les véhicules légers ;
  • 12 000 DA pour les autobus et camions ;
  • et 1 000 DA par passage supplémentaire dans la même journée pour les véhicules fréquents.

Objectif : mieux encadrer la circulation monétaire aux frontières et freiner le transfert illicite de devises vers l’étranger.

Un impact direct sur les voyageurs et les importateurs

Ces nouvelles mesures touchent directement les voyageurs algériens et les entrepreneurs importateurs.
À partir de 2026, toute somme non déclarée au-delà du seuil pourra être confisquée, voire faire l’objet de poursuites pénales. Les importateurs devront, de leur côté, justifier chaque paiement ou transfert à l’international.

Pour le gouvernement, il s’agit de protéger la valeur du dinar et de réduire la fuite des devises dans un contexte économique encore dépendant des hydrocarbures.

Luxe, yachts et biens importés : une fiscalité plus sévère

Le PLF 2026 revoit à la hausse la taxe sur les yachts, bateaux de plaisance et jet-skis, désormais fixée à 400 000 DA. Une mesure symbolique, destinée à renforcer la justice fiscale et à imposer davantage les signes extérieurs de richesse.

Le texte précise aussi que les marchandises confisquées au profit de l’État seront exonérées de droits et taxes douanières, à condition que leur importation respecte la réglementation.

Une politique de rigueur pour un marché assaini

Si le gouvernement se félicite de cette réforme, certains économistes mettent en garde contre une asphyxie administrative qui pourrait freiner les investissements étrangers. Mais pour les autorités, cette politique de rigueur est un passage obligé pour consolider la stabilité financière et restaurer la confiance dans la monnaie nationale.

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