Economie

Auto-entrepreneurs en Algérie : le nouveau décret qui change tout pour la micro-importation

Le nouveau décret 25-170 bouleverse la micro-importation en Algérie, une réforme qui ouvre la voie à une nouvelle génération d’auto-entrepreneurs.

Une réforme très attendue entre enfin en vigueur. Le décret exécutif n°25-170, publié au Journal officiel, redéfinit les règles de la micro-importation et ouvre de nouvelles perspectives aux jeunes auto-entrepreneurs algériens, désireux d’exercer légalement une activité jusque-là confinée au marché informel.

Un tournant pour les petits importateurs algériens

La publication du décret exécutif n°25-170 de juin 2025 marque un tournant pour des milliers d’Algériens. Désormais, toute activité de micro-importation, longtemps tolérée sans véritable cadre, devra s’exercer sous le statut d’auto-entrepreneur.

Cette réforme vise à professionnaliser un secteur souvent jugé anarchique, mais aussi à offrir un statut légal à une génération de jeunes commerçants, qui se livraient jusque-là à des activités d’importation à petite échelle, souvent via les plateformes numériques ou les voyages personnels.

Pour le ministère du Commerce, il s’agit avant tout d’un « acte de modernisation économique ». Dans un communiqué publié fin août, il précise : « L’objectif est de simplifier l’accès à l’activité pour les jeunes tout en encadrant les flux de devises et les importations destinées au marché national. »

Ce que prévoit le décret 25-170

Le texte fixe des conditions précises pour exercer légalement la micro-importation. Tout d’abord, il faut désormais être titulaire d’une carte d’auto-entrepreneur, délivrée par l’Agence nationale de l’auto-entrepreneuriat (ANAE).

Cette carte donne le droit d’importer, à titre individuel, des produits à des fins commerciales, dans la limite d’un plafond annuel déterminé par catégorie de produits.

Les importations doivent être financées exclusivement à partir de devises propres de l’auto-entrepreneur, autrement dit, sans recourir aux allocations touristiques ou familiales. Les marchandises importées ne peuvent être revendues qu’en Algérie et doivent être déclarées via une plateforme numérique mise en place par le ministère du Commerce et de la Promotion des exportations.

Les autorités affirment que ces nouvelles mesures permettront de lutter contre les fraudes douanières et la fuite de devises, tout en soutenant la création de micro-activités dans les wilayas.

Carte d’auto-entrepreneur en Algérie

Un souffle pour les jeunes auto-entrepreneurs

Sur les réseaux sociaux, la réforme a suscité une vague d’intérêt immédiat. Des centaines de jeunes, notamment à Oran, Sétif et Constantine, se sont renseignés sur les modalités d’obtention de la carte d’auto-entrepreneur.
Yanis, 27 ans, vendeur d’accessoires électroniques à Oran, voit dans ce texte une opportunité inespérée :

« Avant, je devais passer par un proche à l’étranger pour acheter mes produits. Aujourd’hui, je peux le faire moi-même, légalement, en respectant un plafond. »

Le gouvernement promet également un accompagnement administratif simplifié, via les guichets numériques de l’ANADE et des chambres de commerce locales. Ce dispositif devrait favoriser la création de micro-entreprises d’importation, notamment dans les domaines du textile, des cosmétiques, des produits électroniques ou de l’artisanat.

Mais des limites qui inquiètent les commerçants traditionnels

Certains petits commerçants redoutent toutefois que la nouvelle réglementation ne bénéficie qu’à une minorité.
Karim B., détaillant à Blida, estime que « les plafonds d’importation sont trop bas pour en vivre réellement ».
De plus, l’obligation de disposer de devises propres limite l’accès à cette activité aux personnes ayant déjà une base financière solide.

Un économiste, Mustapha Gherbi, nuance : « Ce décret est un pas dans la bonne direction. Mais il faudra veiller à ne pas créer une économie à deux vitesses, où seuls ceux qui ont accès aux devises peuvent se lancer. »

Pour éviter cela, certaines associations d’entrepreneurs suggèrent la mise en place de micro-crédits en devises, encadrés par des banques publiques, afin d’aider les jeunes à démarrer leur activité dans des conditions équitables.

Vers une nouvelle génération d’importateurs “responsables”

En toile de fond, cette réforme traduit une volonté plus large, réduire le poids du commerce informel dans l’économie algérienne. Selon le ministère du Commerce, la micro-importation non régulée représentait jusqu’à 15 % du marché national dans certains segments, notamment l’habillement et les accessoires électroniques.

En offrant un cadre légal et simplifié, l’État espère non seulement capter une partie de cette activité dans le circuit officiel, mais aussi stimuler la culture entrepreneuriale chez les jeunes.

D’autant que le statut d’auto-entrepreneur offre désormais des avantages fiscaux (exonérations temporaires, cotisations allégées à la CASNOS) et un accès facilité aux programmes de soutien économique.

Une réforme qui ouvre le champ des possibles

Si le décret 25-170 marque un changement de paradigme, sa réussite dépendra surtout de son application concrète, simplification des démarches, clarté des plafonds, et accompagnement digital. Pour l’heure, l’annonce a déjà eu un effet, une hausse de 18 % des demandes de carte d’auto-entrepreneur enregistrée depuis juillet, selon les chiffres provisoires du ministère du Commerce.

L’Algérie semble donc amorcer une transition vers un modèle économique plus inclusif et plus transparent, où les micro-importateurs trouvent enfin leur place dans l’économie formelle. Un signal encourageant dans un pays où, selon l’ONS, près d’un tiers des jeunes actifs travaillent encore sans statut officiel.

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